Ces vieux qui voudraient vieillir et mourir dans la dignité.

CHSLD, le mot plus utilisé en cette période de pandémie. En somme, un acronyme qui signifie Centre Hospitalier de Soins de Longue Durée. Il a suffi d’un virus, le Covid 19, pour qu’on accorde une importance au phénomène de ces résidences qui accueillent les plus vulnérables personnes de notre société soit les vieux qui ont perdu toute autonomie. Les médias finalement accordent un nom à ces résidences quand des éclosions de ce virus malsain s’y propagent.

On cite les centaines de résidents et les centaines de morts. On parle de ces résidents qui n’arrivent  plus à manger, qui croupissent dans leurs excréments, qui ne peuvent plus se lever pour marcher, qu’on oublie dans leurs souffrances intenables, qu’on prive de la présence de parents, d’enfants et d’amis, et dont plusieurs souhaitent mourir pour mettre fin à cette vie invivable et plusieurs qui ne veulent pas mourir parce qu’ils ont peur de la mort, tout ça parce que personne ne s’occupe d’eux parce qu’ils ne sont pas assez nombreux pour le faire.

Mais qui sont-ils, qui sont-elles ces vieilles personnes ? Ce ne sont pas que de vieux écorchés par la vie, ce sont des êtres humains qui ont un nom et qui souhaitent vieillir et mourir dans la dignité.

Un événement s’est inséré dans ma vie et celle de mon épouse qui nous a initiés à mieux connaître ces humains. Diane et moi avons navigué pendant huit ans à bord de notre voilier tout autour de la mer des Caraïbes. Une aventure qui marque une vie pleine de péripéties, d’expériences et de réflexions.

À notre retour, nous fûmes invités à donner de multiples conférences devant des auditoires fascinés.

Puis un jour, il y a une quinzaine d’années, une préposée aux bénéficiaires dans un CHSLD nous contacta pour que nous prononcions une conférence devant un groupe restreint de résidents. Nous avons accepté en nous interrogeant à savoir qui étaient ces gens. Seraient-ils disposés à nous écouter ?

Ils étaient une trentaine dont plusieurs en fauteuils roulants, certains sur des civières et d’autres sur des chaises adaptées.

Nous présentâmes notre conférence réduite à 45 minutes en insistant sur les moments les plus excitants de notre périple. Puis, la plupart quittèrent  tout de suite après,  mais quelques-uns restèrent sur place en nous regardant. Nous comprîmes qu’ils souhaitaient qu’on se rapproche. Ce que nous avons fait.

En causant avec eux, nous avons découvert une madame Déziel, toute recroquevillée, qui nous a raconté avec excitation qu’elle avait faite le même périple à la voile que nous et plus encore. Il y a cette autre qui avait eu un commerce de belle lingerie pendant de longues années.

Et que dire de ce policier, monsieur Bellemare, qui avait eu une longue retraite heureuse avec une merveilleuse épouse. En levant la main, une madame assise bien droite nous informa qu’elle avait eu une vie de bénévolats dont elle était fière, en nous souhaitant de ne pas avoir une fin de vie comme elle.

Incroyable ! Ces gens handicapés de différentes manières avaient un nom et une histoire de vie remarquable avant. Nous ne les voyons plus de la même façon. Ce n’est plus un groupe de résidents brisés en fin de vie : ce sont Madame Déziel, monsieur Bellemare, etc.

Ils ne représentent que 3 ou 4 % de la vieillesse et pourtant ils font les manchettes des médias comme étant les aînés  de la société, alors qu’il y a 96 ou 97 % vieux actifs et autonomes dont on ne parle pas. Dont on ne parle jamais de toute façon.

Il a fallu ce virus virulent pour générer ce branle bas au cœur de toute la société et mettre en vedette ce 3 ou 4 % les plus vulnérables comme Madame Déziel et monsieur Bellemare. Ils n’ont pas voulu être les vedettes de cette fatalité. Eux, isolés, dans leurs chambres.

Il y a longtemps qu’ils sont isolés et vedettes de la maltraitance. Il y a longtemps que la société les marginalise et que l’État ne veut pas les voir.

Qu’adviendra-t-il d’eux quand la tragédie prendra fin ? Le drame de la vie dite normale reviendra-t-il les hanter ? Il n’y avait pas les deniers suffisants pour les soutenir. Y en aura-t-il après les déficits énormes de la pandémie ? Les restrictions budgétaires reviendront-elles comme un virus permanent pour nos vulnérables comme madame Déziel, monsieur Bellemare et les autres.

Les priorités du gouvernement seront toujours la Santé et l’Éducation. Pourquoi ne pas ajouter les vieux ?  Peut-on rêver la vieillesse dans son entier devenir un projet de société ? Une fois pour toutes, la vieillesse ne pourrait-elle pas engendrer le respect ?

Les vieux ne désirent que de vivre dans la dignité et de mourir dans la dignité. Depuis si longtemps, ce n’est qu’un rêve.

 

 

 

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Une réflexion au sujet de « Ces vieux qui voudraient vieillir et mourir dans la dignité. »

  1. 100% D’accord avec toi et je souhaite cette fin de vie a personne .

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