Chu tanné de me faire dire que je me suis payé un party.

« Vous allez payer pour le party que vos parents se sont payé », a clamé un conférencier devant des étudiants. Il me semble que c’était Jacques Parizeau, à vérifier. Mais je l’ai entendu souvent répété par des jeunes qui ne se sentaient pas responsables envers les vieux qui se sont payé un party. Comme si le testament des générations précédentes leur avait légué une société mal fagotée et que ce sont eux qui en paient finalement la note.

 Les cheveux me dressent sur la tête chaque fois. J’avoue que les plus jeunes « baby boomers » l’ont eu plus facile. C’est pourtant de cette même société que les jeunes profitent à leur tour. Bien imparfaite, mais bien évoluée.

J’ai 78 ans et je me souviens de ma jeunesse. Tellement différente de celle d’aujourd’hui. La télévision n’existait pas encore.  Nous étions plusieurs sur la même ligne téléphonique et les voisins écoutaient les conversations. Le territoire rural n’avait même pas l’électricité.

Le clergé dominait les autorités et toute la société. Les Canadiens français étaient tous des catholiques pratiquants. Les écoles étaient dirigées par le clergé et les hôpitaux par les bonnes sœurs. Le monde des affaires claironnait sous la coupole des riches torontois. Les grandes compagnies, sous la direction d’anglophones, obligeaient les francophones à parler la langue anglaise entre eux. Nous travaillions pour des salaires de crève-faim. Les porteurs d’eau, c’était nous. Ce n’est pas un hasard si un écrivain baptisa son livre « Nègres blancs d’Amérique » pour nous décrire. Allo le party !

Je parle des années 50 et début des années 60. Ces années où fomentait la célèbre Révolution tranquille qui allait bouleverser la province de Québec.

En 1960, Jean Lesage gagna son élection avec le slogan «  Maitres chez nous ». La cloche du départ venait de tinter.

Le département de l’Instruction publique (catholique) devint le ministère de l’Éducation en prônant la laïcité. Les professeurs en majorité des religieux furent remplacés par des professeurs laïques. Les religieux compétents qui désiraient continuer durent oublier la soutane. Cette période vit disparaitre le cours classique pour être remplacée par le secondaire et le CEGEP et vit apparaitre la gratuité scolaire jusqu’à l’Université. Dans un second souffle, ce fut la naissance du réseau de l’Université du Québec avec ses composantes dans diverses régions. L’accessibilité de l’Éducation expliquera plus tard la croissance du nombre d’étudiants. Aujourd’hui, nous avons un des meilleurs réseaux d’éducation qui profitent aux jeunes.

Grâce à l’Éducation améliorée, les citoyens plus instruits accédèrent aux plus hautes fonctions de gestion dans le monde des affaires. Ils furent tellement nombreux les entrepreneurs qui démarrèrent leurs propres entreprises. On créa même une bourse pour aider le financement des petites entreprises qu’on appelait « Québec inc. » Le Journal des Affaires consacrait la majeure partie de ces textes à ce phénomène. L’économie du Québec devint en santé. Les femmes abordèrent massivement le monde du travail augmentant ainsi la main d’œuvre du Québec. Les familles ont accédé par le fait même au double salaire.

Les Compagnies privées d’électricité furent nationalisées. Ce ne fut pas sans bouleversements. Et maints procès. Et aujourd’hui, l’Hydro-Québec fournit l’électricité à la province entière. Elle a construit les plus grands barrages au monde. Ses profits garnissent les coffres de l’État. Hydro-Québec paie une moyenne salariale de 120,000$ alors que la moyenne pour les citoyens est de 49,000$.

Au chapitre de la Santé, les religieuses quittèrent les hôpitaux pour être remplacées par des laïques à moins d’abandonner les attributs vestimentaires religieux comme le voile. Quelle évolution ! Aujourd’hui, le problème semblait réglé quand l’immigration ouvrit les portes à des migrants dont la religion consiste à porter le voile, le turban et autres attributs dits religieux même dans des fonctions d’État dites autoritaires. Ces nouveaux venus exigent de les porter au détriment de nos valeurs et de nos édits déjà prononcés. Le dossier serait au détriment du sort dévolu à nos propres religieuses.

À cette époque, les hôpitaux étaient tarifés et les compagnies d’assurances y voyaient des revenus profitables. Malheureusement, la majorité des patients ne pouvait en assumer les tarifs. Voilà qu’est apparue l’Assurance maladie de l’État pour remplacer le privé au dam de ces dernières. Avant, plusieurs citoyens durent se ruiner pour payer les soins. Dorénavant tous les citoyens furent assurés. Finies les ruines. Malgré la bureaucratie qui complique tout, le système rend encore de merveilleux services.

L’État décida alors de payer dorénavant les médecins à l’acte. Ils étaient déjà grassement rémunérés par les patients et les Compagnies d’assurance. Une révolte médicale survint pour s’opposer. Grèves et menaces de quitter la province de Québec pavoisaient comme affrontements. Malgré des séquelles, le conflit se résorba. Les médecins sont bien rémunérés aujourd’hui, même au-delà de la décence sociale. Une volonté sociale souhaite apporter une baisse pour contrer cette injustice. Une autre révolte médicale est à prévoir pour conserver les privilèges financiers aux spécialistes.

La langue française connut plus que sa part des soubresauts sociaux. Les contrats et les lois étaient écrits en anglais. Les affiches sociales étaient presque toutes anglaises. Pour vivre en français, rédiger les lois en français, afficher en français, etc. il a fallut des manifestations monstres, des procès devant les tribunaux et une volonté gouvernementale du Parti Québécois pour proclamer une loi, la loi 101.  Cette loi charnière fit de la province un État français qui modifia le paysage de tout le Québec. En laissant aux citoyens anglophones la majeure partie de leurs droits acquis.

À la langue française s’adjoint la culture qu’on semble beaucoup oublier. Les francophones ont une façon de penser, tout comme les anglophones la leur. Le Québec français a une vie culturelle, ses vedettes artistiques et ses médias spécifiques.

Le bilinguisme prend une ampleur chez les francophones. Cela semble donner aux anglophones des ailes à leur unilinguisme. Cette situation constitue un danger si l’aspect culturel est réduit d’autant. Ce qui présagera alors une folklorisation et une assimilation !

Tant et aussi longtemps que nous visionnerons des films en langue française, chanterons des chansons françaises, rêverons en français, éduquerons nos enfants dans la langue et culture françaises et que nous commercerons dans la langue de Molière nous survivrons et nous nous développerons. La vigilance doit demeurer au programme.

Comme nous le faisons depuis 50 ans sans baisser les bras.

Les syndicats ont longtemps défendu les moins nantis de notre société. C’est en multipliant leurs batailles, parfois virulentes, qu’ils ont réalisé des gains appréciables pour le Québec. À force de concentrer leur syndicalisme dans les grandes entreprises, ils défendent maintenant en majorité les plus riches de la société et les paresseux.  Les cotisations sont prolifiques et enrichissantes.

Et voilà à quoi ressemblait le fameux party que se payaient les générations précédentes. Elles ont construit un pays à la dure. Aucun pays ne se bâtit sans affrontements, conflits et confrontations musclées. Certains ont recours aux armes, à la guerre et la destruction. Tandis qu’au Québec, la révolution fut tranquille. Et les résultats visibles, aujourd’hui ! Pourquoi une si grande quantité de migrants cherche-t-elle à y immigrer avec autant d’insistance ?

Sur la planète, on se concentre sur la connaissance de l’Histoire de son pays. Les immigrants ont une meilleure connaissance de l’histoire de leur pays d’origine que les jeunes Québécois de leur Québec. Sans oublier le Canada, si intimement relié.

Cette histoire est celle que les vieux ont vécue en partie. En la connaissant mieux, on comprendrait mieux les avantages dont nous profitons tous. Et surtout que ce beau pays, même avec des imperfections, a un passé glorieux avec des héros et de grands personnages.

Chu tanné de me faire dire que je me suis payé un party. Alors que le party, sur sa lancée, continue de profiter à ceux qui nous suivent.

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