On ne sait plus s’il faut éliminer de notre vocabulaire Joyeuses Pâques et Joyeux Noël par respect pour les autres religions ou les sans-religions. Je doute que les pratiquants des autres religions nous le demandent. Ce sont plutôt des politiciens ou entreprises commerciales qui visent à plaire à ces communautés pour des raisons de charme, de clientélisme et, bien sûr, de rectitude. La rectitude a le dos large.
Même s’ils ne sont pas pratiquants, une grande majorité de Québécois se déclarent chrétiens ou catholiques sur les formulaires du recensement. Peu importe leurs pratiques religieuses, la fête pascale appartient au patrimoine religieux et culturel québécois et même planétaire, n’en déplaise à nos athées extrémistes.
Faire fi des rituels et des fêtes à consonance catholique, c’est faire fi de notre histoire et culturelle et religieuse. Le chocolat et le jambon de Pâques y sont aussi culturellement associés. Le Noël blanc est associé à l’hiver et les lumières tandis que Pâques l’est au printemps et au soleil dans les pays nordiques. Une connotation inconnue dans les pays du Sud.
Qu’on le veuille ou non, le catholicisme n’est pas au Québec une religion parmi tant d’autres. Il est normal que tant de rituels historiques continuent de subsister.
Que ce soient les baptêmes, les mariages, les obsèques, les rituels qui ont toujours marqué notre vie par des cérémonies. L’Action de grâce, comme l’américain Thanksgiving, sont aussi parmi les rituels bien ancrés auxquels les autres religions doivent un « respect patrimonial » à l’égard de la terre d’accueil.
Comme bien des Québécois, même si j’ai pris mes distances avec le catholicisme, je continue à croire que les grandes valeurs véhiculées par cette religion au Québec, depuis ses premiers jours, coulent encore dans mes veines et surement les vôtres. Et que ses rituels me rattachent à mon histoire. Une nation n’a pas à se défendre, par des théories alambiquées, de ses premiers pas. La déchristianisation du Québec, aussi rapide soit-elle, ne doit pas ouvrir la porte à la déculturation nationale.
Je refuse de me séparer de mon histoire identitaire. Même au risque de déplaire aux nouveaux arrivants et à de jeunes Québécois qui ignorent tout de ce qui a bâti le Québec et l’a rendu si paradisiaque. Faudra-t-il pour plaire démolir la croix du Mont-Royal ?
Faudra-t-il réécrire l’hymne national du Canada écrit par Basile Routhier, « Ô Canada, terre de nos aïeux », qui ne correspond en rien aux nouveaux arrivants ? Et pourtant le Canada est bien la terre de nos aïeux. Du moins, des aïeux de ceux qui ont bâti le Canada.
N’est-il pas légitime pour un peuple d’honorer avec fierté ses traditions ? De ne pas faire table rase de son héritage, même au nom de la diversité ? Faut-il ratisser le terrain pour permettre l’installation diversifiée de nouvelles cultures ?
L’utopie du multiculturalisme, le vivre côte-à-côte, ne peut qu’enfouir l’histoire entière du Canada au sein de communautés indifférentes à la terre des aïeux.
Le Canada est une vieille terre chrétienne. Y a-t-il du mal à ce qu’elle le demeure ? Non seulement sur la foi, mais également sur l’identité culturelle ?
Peut-on avoir le droit de souhaiter Joyeuses Pâques ou Joyeux Noël sans se justifier et se sentir coupable de discriminer les autres communautés nouvellement arrivées qui ont des traditions religieuses différentes ?
Non. Notre histoire, même religieuse, ne peut pas être célébrée sur le même pied que les autres. Au cours des ans, les deuxièmes et troisièmes générations des immigrants bâtiront leur histoire sur notre terre. Mais à défaut de bien connaitre la nôtre, les fondements de la leur seront fragiles.
Au diable la rectitude. Joyeux Noël et Joyeuses Pâques et autres !
Salut Claude,
Ton texte à l’occasion de Pâques illustre fort bien que le catholicisme n’est pas une religion parmi tant d’autres comme tu le dis si bien. Merci de mettre les pendules à l’heure.
Tu évoques la croix du Mont-Royal. Elle est plus qu’un signe religieux, elle rappelle la création même de Montréal alors qu’en 1642, De Maisonneuve y érigea une première croix parce que le fort de Ville Marie était menacé par de fortes inondations. Et, qui plus est, l’année suivante, le gouverneur transporta cette croix au sommet du Mont-Royal rappelant que la nouvelle colonie fut épargnée. Quelle page d’histoire que cette croix! Affirmons-nous. Sinon, un jour, nos descendants nous le reprocherons.
De tels événements sont intrinsèquement liés à notre histoire …et les signes religieux qui s’y rattachent y sont intimement liés. Ils forment un tout. Si nous prenons le temps de démontrer ce cheminement historique aux nouveaux arrivants, ils comprendront et apprécieront notre détermination. Ils verront même que nous sommes un peuple attaché à sa culture, à ses valeurs et à ses traditions.
Merci de t’affirmer dans cette histoire identitaire toi qui après avoir parcouru le monde est revenu à ton port d’attache. Il y avait certainement un phare quelque part qui a guidé ton chemin.
Merci Claude.
Jacques Lizée