Monsieur Legault, l’Histoire montre qu’il faut garder le fort.

« Racistes, nazis, xénophobes, islamophobes, antisémites, dictateurs, intolérants, ignobles, la liberté de religion, le voile, c’est mon choix, etc. »  Les pancartes arborent ces multiples slogans repris par la foule. Un maire a même parlé de « nettoyage ethnique ». Quand on lit et regarde les médias, on a l’impression d’une guerre civile.

Ça brasse au Québec en ces jours. Le projet de loi sur la laïcité de l’État touche des nerfs bien sensibles. Le débat où se confrontent les idées a pris une tournure de guerre de tranchées. Les invectives virevoltent par médias interposés. Les réseaux sociaux servent d’armements guerriers. Les manifestations sont constituées de fantassins aux mille pancartes qui suivent des leaders derrière l’immense banderole aux inscriptions immenses pour satisfaire la soif des médias.

Il y a tellement de manifestations pour diverses raisons partout dans le monde qu’il est difficile d’y comprendre quelque chose.

Et pourtant le Québec a connu plusieurs manifestations monstres au cours de sa récente histoire. Les grandes réalisations qui ont marqué et bâti le Québec ont toutes connu leurs émois et soulèvements populaires. Voilà pourquoi je vous raconte ce qui suit avant de vous écrire ce que j’en pense.

La nationalisation de l’électricité ne s’est pas réalisée sans une adversité par ceux qui perdaient certains privilèges tout comme les partis de l’opposition. René Lévesque et Parizeau ont tenu bon et aujourd’hui nous profitons de l’Hydro-Québec.

La réforme scolaire laïque a révolté le clergé et les âmes catholiques qui se voyaient dépossédés de leurs privilèges, de leurs soutanes de leurs voiles et de l’enseignement religieux. La révolte ressemblait à celle d’aujourd’hui. Paul-Gérin Lajoie a tenu bon et nous profitons aujourd’hui d’un excellent réseau d’éducation.

Quand Claude Castonguay a réformé le système de Santé et institué l’assurance maladie, les religieuses infirmières, les médecins et les compagnies d’assurances ont donné du fil à retordre au ministre. Les médecins ont même fait la grève et menacé de quitter le Québec. Le ministre a tenu bon et nous profitons aujourd’hui de la gratuité et d’un bon système de santé.

Quand les Italiens voulurent des écoles anglaises à St-Léonard, ce sont les francophones qui descendirent dans la rue et occupèrent les écoles pour conserver les écoles françaises. Une manifestation mémorable. Les Italiens parlent aussi le français aujourd’hui.

La loi 101 a été un événement charnière dans l’histoire du Québec. Le ministre Camille Laurin a dû affronter un vrai flibuster de la part des partis de l’opposition, des anglophones et allophones et du gouvernement fédéral. Tous les qualificatifs dénigrants, à la mode ces jours-ci, pullulaient dans l’univers des manifestations. Les tribunaux ont été mis à contribution. Tous les coups bas étaient permis.

Le ministre Laurin tint bon et la loi fut passée au déplaisir des adversaires. Les débats juridiques qui suivirent apportèrent certains adoucissements. Aujourd’hui, on reconnait les bienfaits de cette loi sans laquelle le fait français aurait perdu des plumes.

Ce ne sont là que quelques exemples. En somme, ceux qui perdent quelques acquis et souhaitent le statu quo tentent de maintenir leurs privilèges en s’opposant à tout changement.

La laïcité quant à elle est une valeur identitaire à laquelle les francophones sont attachés. Sans l’arrivée d’une cohorte de musulmanes voilées, il y a une quinzaine d’années, il n’y aurait pas eu de soulèvement à cette époque. Les médias ont sauté alors sur l’occasion pour en faire leurs manchettes.

La crise des accommodements raisonnables qui en émana fut telle qu’elle a même donné naissance, il y a onze ans, à la grande commission Bouchard-Taylor par le gouvernement libéral de Jean Charest. Cette commission ratissa partout le Québec pour rédiger un rapport final fort important contenant plusieurs recommandations.

Il y fut question, entre autres, de statuer rapidement sur un projet de loi sur la laïcité où tout port de signes religieux serait interdit aux employés de l’État qui assume des fonctions dites coercitives. Cette loi ne fut jamais promulguée puisque le rapport fut en partie tabletté.

Le Parti québécois, pour y donner suite, voulut doter le Québec d’une charte sur la laïcité et les valeurs. Projet qui tomba en désuétude à la suite de la défaite de ce parti. Supporté fortement par les anglophones et les allophones de l’île de Montréal, le Parti libéral mit fin au projet du PQ. Mais tenta de remédier à la situation en concoctant une coquille vide sur la laïcité qui entretenait un statu quo qui durait depuis onze ans.

Il y a onze ans, le rapport Bouchard-Taylor n’incluait pas les enseignants dans la classe des fonctions coercitives. Pour une raison bien simple, il n’y avait aucune enseignante voilée. Le problème n’existait pas.

Depuis, la population musulmane a plus que doublé. Et nombreuses sont les musulmanes voilées qui ont jeté leur dévolu sur l’éducation des enfants. Avec un signe-ostentatoire religieux, le voile. Pourquoi ?

François Legault et son parti ont donc promis d’inscrire une fois pour toutes dans la loi la laïcité telle que définie dans le Rapport Bouchard-Taylor.  Face à une nouvelle réalité bien actuelle, ils ont ajouté les enseignants à la liste de Bouchard-Taylor afin que ces enseignants de l’État n’affichent pas de signes religieux, quelle que soit la religion.  Cet ajout permet par exemple aux musulmanes de professer aux enfants, mais sans ce voile-ostentatoire.

Elles sont plus nombreuses les musulmanes non voilées. Sont-elles moins musulmanes ?  Évidemment, on craint que les enfants vulnérables soient influencés religieusement à la vue du voile d’une personne en autorité toute la journée. On y voit un rôle coercitif comme pour un juge. La laïcité de l’État doit exercer un rôle de vigilance. Seulement pour les postes dits coercitifs. Tout le monde de toutes les religions peut exercer ces postes, mais sans signe religieux. Et ceux qui professent déjà conserveront leur emploi.

Curieusement, les adversaires de cette loi se retrouvent sur l’île de Montréal plus anglophone et allophone. Tandis que la majorité francophone dans le reste de la province souhaite que le projet de loi soit adopté tel quel. Il y a deux cultures. Tout cela me fait penser à la loi 101 et la crise qui l’entoura.

Je souhaite que François Legault et ses troupes  tiennent bon et gardent le fort. La laïcité sera une loi importante et majeure. L’Histoire le dira.

 

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