La société n’aime pas les vieux.

L’autre jour, on m’a félicité parce que je ne parais pas mon âge. Donc, je parais plus jeune. Quel compliment futile ! Comme si seulement paraître plus jeune était un compliment pour un vieux. Pour ceux qui s’y accrochent, peut-être ? Qu’on me dise que je vieillis bien. Qu’on me dise que je fais un beau vieux. Qu’on me dise que j’ai l’air serein. Cela me plaît.

Qu’on me demande ce que je pense de certaines idées. Cela m’honore. En quoi, le fait de dire à quelqu’un qu’il a l’air plus jeune est un compliment ? Quelle est cette obsession de rajeunir son aspect extérieur ? D’avoir l’air plus jeune ? Depuis quand vieillir est-il laid ? Je connais tellement de jeunes…laids. La beauté n’a rien à voir avec l’âge. Elle est d’ailleurs toujours imparfaite. On appelle ça le syndrome du « jeunisme ». Encore un mot inventé ! Mais paraître plus jeune, je classe cela dans l’âgisme.

Notre société n’aime pas les vieux qui ont l’air vieux. Et ça, ce n’est pas un jeu de mots. On me dira qu’il faut avoir le cœur jeune. Quelle imbécillité ! Mon cœur est aussi vieux que ma peau. Quand on nous inflige ces compliments si insignifiants, même les vieux sont gênés d’être vieux.

Tiens, encore un exemple de l’absence d’amour. Le symptôme de ce sentiment de la société envers les aînés réside dans ce qu’elle devrait consacrer financièrement par tête de pipe aux plus pauvres et aux plus blessés chez les vieux. Soit le même montant qu’on alloue par tête aux prisonniers. Mais non, on aime mieux les prisonniers.

On a sorti du chapeau du magicien deux milliards de dollars pour les garderies. Mais on a perdu le chapeau pour les vieux. Un autre milliard pour les avortements, mais la caisse est vide pour les vieux. Un autre milliard pour les congés parentaux des pères. Le gouvernement  oublie les anciens papas. On a déniché ipso facto, de nulle part, des millions de dollars pour recevoir les réfugiés. Ne pourrions pas en trouver quelques-uns pour aimer les vieux?

Quelle belle société nous sommes, nous qui aimons si peu nos vieux. Il suffit de consacrer une pensée à la piètre condition des vieux dans les CHSLD.

Il suffit de se rappeler que les régimes  des pensions si généreuses n’existaient pas à l’époque où les vieux ont bâti le Québec. La génération d’avant les baby-boomers se contente d’une prestation de pauvre. Des associations d’anciens retraités tentent de sensibiliser nos dirigeants. Elles ne reçoivent qu’une fin de non-recevoir. Nous manquons d’argent, disent-ils ?

Quand j’écris que la société n’aime pas ses vieux, je pense aussi aux soins que l’on coupe, comme  les garder à la maison. On coupe pour les vieux et l’on trouve des milliards de dollars quand on le veut bien pour tant d’autres besoins. Nous aimons si bien nos spécialistes et tant d’autres que nous les traitons généreusement.

Je suis pourtant si fier de ma vieillesse et de tous ces souvenirs qu’elle apporte. Je prétends à cette sagesse qui colle à mon âge. Je revendique le droit d’exprimer ce que la vie m’a appris. Je réclame aussi pour les vieux plus pauvres le droit de vieillir dans la dignité. La dignité du vieil âge, cela doit bien exister ! Un peu d’amour ne serait pas anecdotique.

Félix Leclerc ne disait-il pas que « Vieillir, c’est embêtant.
Mais c’est la seule façon de vivre longtemps ». 

 

 

 

 

 

 

 

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